La philosophie de rémunération des cadres chez le sud-africain MTN vise, comme le groupe le clame d’ailleurs, à offrir une structure de rétribution compétitive, différenciée et flexible comme moyen d’attirer, de récompenser et de retenir les employés et directeurs performants et de qualité. La démission de Wim Vanhelleputte, le directeur général de MTN Côte d’Ivoire, après six ans d’activité pour cause de refus de revalorisation de ses conditions de travail, si l’on en croit les différents médias ayant rapporté l’information, amène à questionner cette philosophie, sinon à croire qu’il y a quelque chose qui n’a pas marché cette fois-ci. Il y a également quelques semaines (le 14 mai 2015), Serame Taukobong, le DG de MTN Ghana avait démissionné de son poste pour rejoindre General Electric où il occupera, d’après des sources concordantes, le poste de directeur commercial pour l’Afrique. Celui-ci a été remplacé quelques heures plus tard par le Ghanéen Ebenezer Asante.
D’après les informations obtenues de bonnes sources, après six ans en Côte d’Ivoire, Wim Vanhelleputte devait en principe être muté dans un autre pays où la taille des opérations est au moins équivalent à celle de la Côte d’Ivoire, voire plus grande. En effet, parmi les trois plus grandes opérations (large Opco) du groupe, le Ghana vient en première position, le Cameroun en deuxième position et la Côte d’Ivoire en troisième position en termes de chiffres d’affaires (avec respectivement au 31 décembre 2015, 2 674 Rm ; 2 651 Rm et 2 475 Rm). Le Ghana et le Cameroun ayant déjà chacun eu un nouveau Dg en avril et en mai 2015, apparaissait-il compliqué de trouver à Wim une nouvelle destination ? Rien n’est moins sûr.
Ces deux démissions amènent à s’intéresser sur le modèle de rémunération au sein du groupe MTN. Si les chiffres exacts des salaires des directeurs généraux des filiales de MTN ne sont pas rendus publics, ceux des directeurs exécutifs le sont. Tout comme les principes qui déterminent la rémunération de l’ensemble des employés du groupe. Chez MTN Group donc, c’est le Comité des Ressources humaines et de la rémunération qui se charge de proposer au conseil d’administration et aux actionnaires le montant des salaires et bonus des directeurs exécutifs et directeurs non-exécutifs du groupe. Ce comité, à qui le conseil d’administration a délégué ces pouvoirs, s’assure que cette rémunération rime avec les stratégies de l’entreprise et la bonne gouvernance. Il veille également à ce que les montants fixés n’aillent pas en contradiction avec les intérêts des actionnaires. Pour fixer ces salaires, le Comité peut faire appel à des consultants externes. Idem pour la revue constante de la stratégie de rémunération si l’on note un dynamisme du marché. « Nous croyons que l’investissement dans le capital humain doit être proportionné avec la performance. En sélectionnant un individu, nous considérons la combinaison compétence, habileté et expérience nécessaires pour réaliser nos priorités stratégiques », précise le groupe MTN.
Salaires des directeurs exécutifs chez MTN
Source : MTN Group [à noter, 1000 Rands = 50 000 FCfa env. = 76,3 euros env.]
De manière générale, la compagnie ne rémunère pas ses salariés sur un principe d’égalité. Le groupe MTN explique que ces différences salariales existeront toujours, car influencées par l’offre et la demande des compétences, ainsi que par les autres charges salariales dont bénéficie chaque employé. Les salaires des directeurs exécutifs et des directeurs généraux des opérations de MTN à travers le monde sont quant à eux fixés en fonction de la taille de la compagnie, de la complexité du travail, du chiffre d’affaires et des taux du marché. Pour ce qui est de la prise en charge des directeurs expatriés, le Groupe MTN a révisé sa politique il y a quelques années pour introduire une relative équité salariale entre les directeurs généraux de ses différentes opérations à travers le monde. Il existe donc une base salariale pour les directeurs expatriés. Mais, les spécificités locales et le dynamisme du marché y sont ajoutés.
Salaires des directeurs du Comité exécutif de MTN Group
Source : MTN Group [à noter, 1000 Rands = 50 000 F.Cfa env. = 76,3 euros env.]
Eléments de la rémunération
Pour ce qui est de la structure de la rémunération, MTN a opté pour un package annuel baptisé « Total Reward ». L’on y inclut le salaire fixe, les différents bonus, les avantages sociaux, les paiements d’incitation à court et à long terme et enfin des diverses indemnités. Chez MTN, le salaire fixe est déterminé en fonction de la performance. Le groupe a mis en place les paiements d’incitation basés sur le rendement. Ils sont réglés à court et à long terme pour encourager les directeurs exécutifs performants à rester au sein de la compagnie. Ces paiements d’incitation peuvent se traduire en attribution des parts dans la société (à long terme) ou encore en espèces sonnantes à la fin d’un exercice quand les résultats annuels ont été atteints ou dépassés. « L’attribution des actions vise à conduire la durabilité à long terme et la performance du groupe (…) Les régimes d’incitation à long terme sont conçus pour retenir les employés clés et les hauts cadres en alignant leur contribution à long terme au succès de la société et aux intérêts des actionnaires », a expliqué MTN Group lors de la présentation de ses résultats financiers pour l’exercice 2014 sans toutefois préciser le montant ou le pourcentage de ces actions. Mais, il est indiqué que la valeur de cette récompense est exprimée en pourcentage de la rémunération fixe. MTN Group prévoit par ailleurs dans sa politique de rémunération la récompense des bonnes habitudes qui permettent aux filiales respectives de parvenir aux résultats financiers fixés.
En ce qui concerne les bonus, le staff général et les directeurs exécutifs sont tous éligibles. Ces bonus sont calculés et attribués en fonction de la performance du groupe, de la performance des équipes et/ou des individus. « Au cours de l’année 2014, nous avons réexaminé le régime du bonus de rendement pour nous assurer qu’ils soient alignés avec les tendances du marché. Après ce réexamen, nous avons fait un réajustement du score de performance requis pour obtenir le maximum de bonus. Auparavant, un score de 3,30 était requis. Il a été abaissé à 2,80 et communiqué à tous les employés », explique le groupe. Ces primes sont payées dans les différentes filiales du groupe après validation par le Comité qui s’assure au préalable que les seuils minimaux de performance ont été atteints ou dépassés.
Salaires des directeurs non-exécutifs chez MTN
Source : MTN Group [à noter, 1000 Rands = 50 000 F.Cfa env. = 76,3 euros env.]
Il faut également relever qu’en 2014, le groupe, pour se prémunir des fuites et dans l’optique de préserver ses stratégies d’entreprise, a révisé la structure de ses contrats signés avec ses dirigeants pour y inclure des dispositions visant à protéger l’entreprise. Par exemple, les démissionnaires ne pourront pas aller chez les concurrents de MTN les six premiers mois qui suivent leur démission. De même, ils doivent donner un préavis de démission six mois à l’avance. Certains contrats signés en 2014 comportent ces obligations.
S’il y a eu des démissions ces dernières semaines chez MTN, on peut également relever l’arrivée d’autres directeurs. Par exemple, l’ex-directeur de Vodacom en charge des services financiers digitaux, Herman Singh, a démissionné de son poste le 12 mai 2015 pour rejoindre le groupe MTN. Il y occupera d’après certaines indiscrétions le poste de directeur en charge du Digital du groupe (Chief Digital Officer). Tout n’est donc pas négatif, parait-il.
Source : Agence Ecofin