[Digital Business Africa] – En République Démocratique du Congo, au lendemain de l’annulation le 3 février 2019 par le président Félix Tshisékédi du contrat signé entre le gouvernement congolais et AGI (African General Investment Limited) en 2018 relatif à la gestion d’un nouveau système de contrôle des flux téléphoniques des réseaux des opérateurs des télécommunications, le ministre des Postes, des Télécommunications, et des Nouvelles technologies de l’information et de la Communication, Emery Okundji sort de sa réserve.
Un contrat annulé sous fonds d’irrégularité dans l’attribution et une rémunération jugée excessive
A l’origine de la décision présidentielle, la répartition arrêtée avec les anciennes autorités congolaises : D’après certaines informations, 85% du total des revenus perçus de la taxe sur les flux téléphoniques reviendrait à AGI, 10% irait à l’Etat congolais à travers l’Autorité de Régulation des Postes et Télécommunications ARPTC et 5% pour la Commission parlementaire en charge des TIC et télécoms. Une rémunération jugée exagérée et qui a créée depuis la polémique dans le pays.
Dans le même temps, les opérateurs de télécoms ont dénoncé un contrat qui d’après eux entraînera un surcoût et allait occasionner une augmentation de 27 % de leurs tarifs. Il est fait état de ce que ces nouvelles taxes devraient automatiquement impacter les prix des appels, de SMS et de l’Internet de l’ordre de 60% au minimum. Dans la foulée, le Premier ministre Bruno Tshibala Nzenzhe qui avait signé ce décret, ainsi que le ministre des PTNTIC Emery Okundji avaient été accusés d’avoir des intérêts indirects dans ce contrat dont ils tireraient des avantages illégalement.
Emery Okundji : « Avec le contrôle, les recettes de l’Etat dans les télécommunications tripleront voire quadrupleront »
Face à cette polémique, le ministre des PTNTIC, Emery Okundji, a fait une sortie chez nos confrères de Scooprdc.net pour dire sa part de vérité dans cette affaire. Tout d’abord, il remet en question les allégations selon lesquelles le décret du Premier ministre souffrirait d’un déficit de régularité et de concertation : « le décret incriminé du Premier ministre a été pris conformément à l’article 92 de la constitution telle que modifiée à ce jour, qui confère le pouvoir réglementaire au Premier Ministre, Chef du Gouvernement. La matière sous examen a été défendue et discutée, comme de droit et de coutume, à la fois devant la commission ECOFIRE que celle des textes des lois et règlements du Gouvernement puis devant le Conseil des Ministres avant d’être sanctionnée par un Décret ».
Dans la foulée, il assure que malgré la suspension du contrat, on ne peut pas encore parler d’une résiliation : « Dès lors, le principe de parallélisme de forme exige qu’un acte administratif parallèle de même force décide de son annulation. Ce qui n’est le cas à ce jour ».
Ensuite, le ministre Emery Okundji revient sur le fonds du dossier et justifie un contrat qui aurait permis de faire enfin la lumière sur le niveau exact des revenus des opérateurs télécoms présents dans le pays : «Elles (les sociétés télécoms) déclarent toutes des pertes à chaque clôture d’exercice comptable alors que les consommations des unités de communication et mégabits ne cessent de croître dans notre pays. Bien plus, la plupart des déclarations des opérateurs de téléphonie sont faites sans production d’éléments détaillés devant permettre aux services d’assiette et aux régies financières d’en apprécier la sincérité. Ce qui rend encore plus difficile sinon impossible le contrôle par l’Etat de la hauteur réelle des revenus que ces opérateurs génèrent…Le contrôle des flux téléphoniques est donc une décision prise par le Gouvernement congolais dans le but de combattre le coulage des recettes provenant du secteur des télécommunications à titre notamment de la taxe sur la valeur ajoutée, des droits de consommation sur les communications téléphoniques, les droits, taxes et redevances frappant les activités des télécommunications. Ce n’est nullement une affaire personnelle du Ministre Emery Okundji », ajoute le ministre.
Dans sa sortie, le ministre Emery Okundji s’étonne également du fait que pour diaboliser AGI, les opérateurs font leurs calculs sur plus de 3 milliards des minutes le trimestre, mais lorsqu’ils déclarent bimensuellement, ils n’arrivent pas à 1 milliard des minutes. Une réalité qui lui fait affirmer : avec le contrôle, les recettes de l’Etat dans les télécommunications tripleront voire quadrupleront. C’est la peur des opérateurs des télécoms.
Enfin, le ministre Emery Okundji revient sur la polémique née de la rémunération de AGI et défend une disposition en entière conformité avec la loi : « Dans le but de permettre un meilleur fonctionnement de l’opérateur de contrôle et de lui assurer non seulement l’amortissement de ses investissements (entièrement préfinancés par elle) mais également une indépendance vis-à-vis des sociétés contrôlées, il lui a été octroyé une rémunération tirant sa source dans la Loi n°014/2002 du 16 octobre 2002 portant création de l’ARPTC qui, en son article 21, prévoit notamment au nombre des ressources financières ordinaires de cette structure, les revenus de ses prestations. La rémunération d’AGI c’est sur les redevances dues à l’ARPTC et non sur les recettes de l’Etat ».
Ecrit par Jephté TCHEMEDIE