[Digital Business Africa] – Coup de théâtre dans le jeu de succession de Bob Collymore à la tête de Safaricom. Alors qu’il devait rendre son tablier fin août 2019, le patron du leader kényan des télécoms a décidé de rester à son poste pendant une année supplémentaire, révèle-t-il ce 23 mai 2019. Le temps de mieux préparer son successeur ?
Finalement, Bob Collymore partira à la fin du mois d’août 2020 et non plus fin août 2019, tel qu’initialement prévu.
«En fait, je ne vais nulle part […] J’ai été malade pendant un an. J’ai donc prolongé mon mandat d’un an. Je suis ici jusqu’en 2020 pour continuer, espérons-le, à servir l’entreprise et le pays», a déclaré le PDG de Safaricom lors d’un point de presse ce jeudi en marge de l’ouverture de l’Africa Shared Value Summit qui se tient à Nairobi ces 23 et 24 mai.
Entre fin 2017 et juillet 2018 en effet, Bob Collymore avait effectué un congé maladie de neuf mois. Atteint d’un cancer qu’il évoque ouvertement à la télévision, le patron de Safaricom -né au Royaume-Uni et élevé au Guyana- prévoyait son départ au terme de son contrat en août prochain. Mais, l’insistance du gouvernement à recruter un Kényan pour lui succéder avait retardé l’annonce de son remplaçant. Ainsi, contre toute attente, ce nouveau membre du conseil d’administration du National Cancer Institute nommé début mai restera encore l’homme fort de Safaricom pendant un an. Pour légèrement détailler ses explications, il a simplement déclaré : «Je suis en quelque sorte redevable à l’entreprise […] et le conseil d’administration et moi avons convenu que nous allions étirer nos efforts pendant un an».
Derrière cette affirmation, difficile de ne pas voir le signe de l’enlisement des discussions autour du remplacement de Bob Collymore, qui devrait initialement quitter son poste en août 2019. Depuis la création de Safaricom en 1997, jamais un kenyan n’a dirigé l’entreprise, en dépit du fait que l’Etat kenyan possède 35% du tour de table de l’opérateur. On le sait donc, le gouvernement kenyan souhaite voir un kenyan prendre la tête de l’entreprise après le PDG actuel. Une exigence pas forcément approuvée par l’actionnaire majoritaire, le britannique Vodafone qui détient 40% des parts. Ce qui ralenti considérablement le processus de succession à la tête de l’entreprise.
Jusqu’ici quelques noms circulaient au sujet de ses potentiels remplaçants, dont celui d’Isaac Awuondo, patron de la Commercial Bank of Africa (CBA) et président du conseil d’administration de la Kenya Airports Authority (KAA). L’année supplémentaire de Bob Collymore à la tête de Safaricom servirait à mieux préparer son successeur.
D’autant que le gouvernement kényan – actionnaire à hauteur de 35% ; Vodacom Afrique du Sud (35%) ; Vodacom Group (5%)- n’a aucun intérêt à voir Safaricom ralentie par des difficultés de gestion, dans un contexte où la firme, devenue la plus importante du secteur des télécoms en Afrique de l’Est, porte actuellement des ambitions panafricaines.
Si pour l’instant il est difficile de dire avec précision quelle sera l’issue de ces négociations, on sait tout de même que le successeur de Bob Collymore aura un véritable challenge à relever, celui de la conservation du leadership de Safaricom et de son développement à l’étranger. En effet, Bob Collymore laissera en août 2020 une entreprise en parfaite santé, sur une courbe ascendante.
Durant sa présidence, le cours de l’action de Safaricom a grimpé de plus de 400% à la Bourse de Nairobi. Pour l’année 2018, Safaricom a réalisé un bénéfice net de 626,1 millions de dollars, soit en hausse de 14,7%. Mais surtout, on retiendra de lui le développement de M-Pesa, l’application qui a révolutionné l’usage du mobile money en Afrique et dans le monde.
Par Jephté Tchemedie et Gaëlle Massang